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Le cégep français : un sanctuaire menacé (1/2)

Un texte de Yannick Lacroix
Thèmes : Éducation, Québec, Langue
Numéro : Argument 2020 - Exclusivité Web 2020

Si rien n’est fait, le réseau collégial dans la métropole du Québec se divisera bientôt entre un réseau patricien anglophone, dominant le préuniversitaire, et un réseau plébéien plus ou moins bilingue, consacré au secteur technique. Dans ce contexte, on peut se demander ce qui adviendra de la formation générale, en particulier des cours de littérature française et des cours de philosophie – lesquels n’existent pas dans le système anglais –. Ce scénario catastrophe ne sort pas d’un imaginaire fiévreux, il est déjà en train de se réaliser. L’avenir se lit très clairement dans les tendances statistiques actuelles. Il faut regarder les chiffres : demography is destiny.

 

Le problème est aussi bien qualitatif que quantitatif. Le palmarès des cégeps publié par le Journal de Montréal au mois de février 2020 l’a démontré : le cégep anglais fait l’objet d’une telle demande qu’il peut se permettre d’écrémer les meilleurs étudiants, ce qui se reflète dans des taux de diplomation stratosphériques. Pendant que les demandes d’admission au premier tour dans les gros cégeps français de Montréal chutaient d’une dizaine de points de pourcentage dans les cinq dernières années, le seul cégep de Dawson a fait l’objet de quelques 11 300 demandes d’admission en 2019 : ce qui lui permet de fixer son plancher, pour les moyennes admises en sciences pures, à plus de 85%. L’«excellence » de l’institution en découle mathématiquement. En comparaison, les cégeps français ne font pas le poids. Ils sont déclassés. L’élite étudiante, francophone comme allophone, se rue vers le cégep anglais : si la tendance se poursuit, d’ici deux ou trois ans le préuniversitaire anglais représentera plus de la moitié des places sur l’île de Montréal. Ceci, alors que les anglophones ne représentent que 17.4% de la population montréalaise. Ils sont d’ailleurs minoritaires dans les cégeps anglais depuis 2001. Le déséquilibre institutionnel est flagrant.

 

            Depuis 1995 (qui représente le pic de la fréquentation des cégeps français), le mouvement ne se dément pas et va en s’accroissant constamment, si bien qu’en 2018, les cégeps anglais accueillaient environ 5700 étudiants de plus qu’ils ne le faisaient en 1995, alors que les cégeps français n’en accueillaient que 300 de plus : autrement dit, la hausse démographique a profité presque exclusivement au réseau anglais. Dans le secteur préuniversitaire, les cégeps français perdaient 1000 étudiants sur la même période, tandis que les cégeps anglais en gagnaient 3500, soit l’équivalent d’un gros cégep. C’est énorme. Si la loi 101 avait été appliquée au collégial dès 1977, c’est non loin d’un demi-million d’étudiants supplémentaires que le réseau français aurait reçus. Pour une petite population comme celle du Québec, ce n’est pas une goutte d’eau dans la mer, c’est un tsunami. [1]

 

            Il y aurait énormément de choses à dire sur ce phénomène, mais je veux m’attarder ici sur l’une de ses significations les plus importantes à mes yeux : l’écroulement en cours du réseau collégial francophone tel qu’on le connaît – du moins sur l’île de Montréal – pourrait bien signer l’arrêt de mort de la culture en français au Québec.[2] Cette culture est en effet en train d’y perdre à la fois ses émetteurs et ses récepteurs : si nous n’agissons pas maintenant, à un niveau structurel profond, son avenir est sérieusement menacé.

 

 

Un choix anglicisant (côté récepteur)

 

            La donne a profondément changé au cours des vingt dernières années. On a abandonné, sans le dire, la politique linguistique de l’État québécois, qui était définie par la défense et la promotion du français comme langue officielle et comme langue commune. On ne peut pas vraiment parler de « laisser-aller » : on a, bien au contraire, promu très activement le bilinguisme, c’est-à-dire l’anglais. On a doublé, voire triplé les cours obligatoires d’anglais aux cycles primaire et secondaire, quitte à sabrer dans les autres matières : on en a fait la matière capitale, alors qu’il n’est pas clair que l’apprentissage précoce d’une langue seconde en « contexte formel » (à l’école) soit avantageux sur le plan cognitif. Un avis du conseil supérieur de l’éducation parle même de cette idée comme d’un « mythe ».[3] Selon un rapport du CREXE, c’est à la demande pressante de groupes parentaux, plutôt qu’en vertu d’une nécessité pédagogique scientifiquement démontrée, qu’on a introduit l’enseignement intensif de l’anglais à l’école primaire.[4]

 

Au même moment, l’industrie culturelle subissait une transformation dont on peine encore à comprendre la nature : sa dématérialisation, c’est-à-dire sa numérisation l’a livrée aux mains d’une poignées de compagnies, pour la plupart américaines, qui diffusent un contenu essentiellement anglophone. On cherchera en vain un quelconque contenu « québécois français » sur Netflix, par exemple. Et pour couronner le tout, une crise épidémiologique inédite est en train de donner un sérieux coup d’accélérateur au télé-enseignement. Quelles seront les conséquences de cette mutation technologique du système éducatif sur le français au Québec? Elles sont difficiles à prévoir, mais sachant que le français peine déjà à tenir sa place dans l’enseignement « présentiel », on l’imagine mal tirer son épingle du jeu de l’abstraction digitale qui s’instaure par le biais de technologies anglotropes.

 

Les jeunes Québécois vivent ainsi une sorte d’immersion permanente dans la langue anglaise. La situation n’a plus rien à voir avec ce qu’elle était pour ma propre génération (X/Y), sans parler de celle des baby-boomers. L’anglais, la lingua franca, ne leur paraît plus cette divinité aliénante qui opprime, comme c’était le cas peut-être encore pour leurs grands-parents. À l’âge d’entrer au cégep, les jeunes francophones montréalais sont désormais déjà bilingues (français-anglais) à 80%. Pendant ce temps, le bilinguisme hésite entre le recul et l’immobilité chez les jeunes anglophones – signe des temps, s’il en est.[5]

 

Si cette jeunesse (allophone comme francophone) se rue maintenant sur le cégep anglais, au détriment du cégep français, ce n’est pas pour apprendre une langue qu’elle connaît déjà : c’est afin d’intégrer le monde anglophone. Questionné sur ses motivations dans une étude menée par l’IRFA en 2010, un jeune francophone fréquentant un cégep anglais répond: « Je veux parler sans accent. »[6] On ne saurait mieux exprimer son désir d’assimilation. Et comme le montre la même étude, le choix du cégep anglais entraîne une cascade de conséquences toute plus anglicisantes les unes que les autres : il mène à l’université anglaise, au travail en anglais, à des rapports sociaux et à la consommation culturelle en anglais, etc.[7] À terme, tout cela ne saurait être sans impact sur la langue d’usage, c’est-à-dire sur la langue qu’on transmet en priorité à ses enfants. Incidemment, sur l’île de Montréal, le français langue d’usage a baissé, entre 2001 et 2016, de 56.4% à 53.1%; soit une chute de 3.3% en 15 ans, du jamais vu depuis qu’on fait des recensements au Canada (1871).[8]

           

Le choix du cégep anglais est donc un « choix anglicisant ». Les jeunes Québécois, qui vivent dans une province dont la langue officielle est le français, n’ont pas besoin de plus d’anglais, « langue seconde » dans laquelle ils baignent déjà constamment, ils ont besoin de plus de français. À la fin du parcours collégial, après 13 années d’enseignement de cette langue, c’est un étudiant sur cinq qui échoue, parfois malgré des tentatives répétées, une épreuve uniforme de français dont certains estiment pourtant qu’elle est prévue pour des « cancres ».[9]

 

Quel bilinguisme est encore possible dans ces circonstances? Un bilinguisme soustractif, soit celui d’un Jean Chrétien aux « deux langues secondes »? Les conditions ne sont pas données à tous de pouvoir se rendre maîtres de plus d’une langue ; beaucoup peinent même à en maîtriser une seule.  Si les conditions ne sont pas réunies pour l’apprentissage réussi et enrichissant de deux langues, l’une des deux sera immanquablement négligée, et au Québec ce sera le français plutôt que l’anglais. C’est que le statut et le prestige du français sont en chute libre. Pourquoi, en effet, perdre son temps à explorer les complexités d’une langue déclinante, dont la valeur marchande plonge constamment? Pourquoi s’identifier à cette langue difficile, alors qu’elle devient progressivement inutile?

 

La réalité est que la jeunesse québécoise – une certaine jeunesse québécoise – est en train de tourner le dos au français, dont elle semble ignorer autant la puissance que la fragilité. Impossible de lui en tenir rigueur : elle tire simplement la conclusion d’un syllogisme dont nous avons posé, ou laissé poser les prémisses. Hors l’anglais, point de salut, martèle-t-on depuis des décennies; le message est passé.

 

 

Un sanctuaire menacé (côté émetteur)

 

    On distingue souvent entre bilinguisme individuel et  bilinguisme institutionnel, dans l’idée que si le premier doit être encouragé, il faut se méfier du second : car la force attractive de l’anglais est telle que le français ne saurait se maintenir longtemps face à lui dans un même cadre institutionnel. Si nous sommes attachés au Québec français, dans les conditions actuelles il nous faut tout autant refuser l’instauration de ce qu’on peut appeler le « bilinguisme concurrentiel » dans le réseau collégial.[10] Importer à l’intérieur des murs des cégeps francophones la concurrence linguistique dont ils sont victimes à l’extérieur, comme nous sommes en train de le faire, relève de l’aveuglement.

 

On peut difficilement agir – efficacement – sur la demande : les mesures incitatives ont depuis fait longtemps la preuve de leur insuffisance. Il faut donc agir sur l’offre, et on sait ce que cela signifie : l’extension des clauses scolaires de la loi 101. Mesure politiquement difficile, certes. Mais il faut bien comprendre ceci : des institutions d’enseignement françaises assurées dans leur identité et dans leur continuité constituent un strict minimum si l’on entend ne serait-ce que freiner l’anglicisation en cours. Il faut que le français ait son lieu sûr et sa fonction propre. S’il ne trouve même pas refuge dans nos institutions d’enseignement, il n’a pas d’avenir au Québec. Il faut protéger et renforcer les structures publiques où le français vit actuellement d’une vie de plus en plus artificielle. Alors, mais alors seulement, pourra-t-il acquérir à nouveau, aux yeux d’une – certaine – jeunesse qui n’en voit plus guère, de l’utilité et de l’attrait.

 

         Ce n’est malheureusement pas sur cette voie que nous sommes engagés. C’est non seulement sa politique linguistique que l’État québécois semble avoir abandonnée, mais aussi sa politique culturelle. Celle-ci, adoptée en 1992, prétendait promouvoir « la valorisation de la langue française comme un moyen d’exprimer la culture et d’y accéder »[11]. Trente ans plus tard, c’est pourtant l’anglais qui domine outrageusement comme langue d’expression de la culture – alors même que les anglophones ne représentent que 8.1% de la population du Québec. L’explosion des inscriptions dans les cégeps anglophones n’est, de ce point de vue, qu’un symptôme.

 

À cet égard, la Fédération des Cégeps se veut rassurante : ce ne sont que quelques milliers d’étudiants non-anglophones qui fréquentent annuellement le réseau anglais ; il n’y a pas de quoi en faire tout un plat[12]. Comme nous le rappelle d’ailleurs un mémoire de la Fédération publié en 2013 à l’occasion du projet de loi 14, qui voulait modifier la Charte de la langue française, le système collégial n’est tenu ni légalement (par la loi actuelle des collèges, le Règlement sur les études collégiales ou par lettres patentes), ni constitutionnellement (par la Charte canadienne des droits et libertés), au respect de critères linguistiques[13].

 

En effet. Mais on peut se demander à qui revient alors la tâche de défendre au Québec la culture en français, si elle ne revient même pas aux institutions d’enseignement supérieur financées par les contribuables. Remarquons d’ailleurs que la Charte canadienne des droits et libertés n’empêcherait pas non plus le Québec de modifier sa propre loi et ainsi assujettir le réseau collégial à des critères linguistiques.

 

      Disons-le donc : en cette matière, la Fédération des Cégeps est de mauvaise foi.[14] La preuve que la perte de ces « quelques milliers » d’étudiants annuels fait mal au réseau français se tire de la réaction des directions collégiales elles-mêmes, qui tentent désespérément d’angliciser leur « offre de services », comme l’ont montré des manchettes récentes sur le projet de cégep bilingue à Vaudreuil. À la demande des directions francophones, le ministère vient par ailleurs d’autoriser des nouveaux programmes de sciences pures et humaines « avec langue seconde enrichie ». On se demande laquelle.

 

Remarquons d’ailleurs qu’on en est peut-être bien à « bilinguiser » le réseau français pour rien : car les étudiants qui choisissent le cégep anglais ne veulent pas simplement approfondir leur apprentissage d’un outil linguistique qu’ils possèdent déjà, ils veulent passer à l’ouest, ils veulent s’assimiler. Or, il est douteux qu’un réseau disons franco-bilingue, mi-figue mi-raisin, parvienne à faire correctement ce travail. D’un point de vue strictement clientéliste, l’idée n’est déjà pas excellente. Comme le dit Charles Castonguay : « Soyons sérieux. Apprendre l’anglais dans un cégep français n’aura jamais l’attrait de the real thing.[15]» Un jour viendra où les directions le comprendront et passeront à l’étape suivante.

 

            Pour le Québec français, il y a péril en la demeure. Car le cégep français est (encore) une courroie de transmission privilégiée de la culture en français : je n’y connais pas d’équivalent. Le cégep est l’un des derniers sanctuaires de la culture en français, l’un des derniers lieux où les jeunes Québécois, aux origines et aux destins divers – ce qui fait toute la beauté du système collégial –, sont mis, en nombre substantiel, en contact prolongé avec elle. Christian Rioux le disait joliment dans sa chronique du Devoir, le cégep est l’endroit où se crée – ou peut se créer – un « attachement charnel » à la culture.[16] C’est au cégep que la plupart d’entre nous lisons et écrivons nos premiers véritables textes argumentatifs et littéraires. Ce n’est pas au secondaire, c’est au cégep qu’on accède au monde des idées. Or, la langue dans laquelle on y accède est déterminante. Cela donnera le ton à toute la suite de notre vie intellectuelle. La langue n’est pas un outil de communication neutre, c’est une visée unique sur les idées et à travers elles, la réalité. On ne pense ni tout à fait aux mêmes choses, ni tout à fait la même chose dans une langue et dans une autre.

 

           Par l’expression « culture en français », je n’entends donc pas seulement la diffusion de la culture québécoise et de la culture française, j’entends aussi l’établissement d’une certaine relation linguistique avec le fait même de la culture. La langue et la culture ne sont pas identiques, mais elles entretiennent des rapports structurels profonds. Il existe peut-être, par exemple, des corrélations entre la grammaire d’une langue et le type d’objet de pensée qui peut exister pour elle. Mais ce ne sont pas ces questions complexes que je veux développer ici. J’ai quelque chose d’ordre plus pratico-pratique en tête, que j’exprimerai à partir d’un exemple personnel.

 

Comme professeur de philosophie, je suis appelé à enseigner les bases de la pensée politique moderne, qui proviennent en bonne partie du monde anglo-saxon. Thomas Hobbes, par exemple, écrivait bien sûr en anglais; mais je l’enseigne en français, et ça marche très bien. Mon acte est un acte performatif, presque politique : je ne suis pas seulement en train de dire que hors l’État, c’est « la guerre de tous contre tous », je suis aussi en train de dire que la langue officielle du Québec est le français et que par conséquent, je l’utilise ici tout naturellement pour enseigner la pensée d’un auteur anglophone. Par là-même, je fais du français la langue commune du Québec.

 

Illustrons cela derechef: qu’est-ce que cela change d’enseigner Nietzsche en anglais plutôt qu’en français, considérant qu’il écrivait de toute façon en allemand? Indépendamment du fait que Nietzsche en français constitue un objet culturel en soi, lequel n’est ni Nietzsche en anglais ni Nietzsche en allemand, enseigner Nietzsche en français plutôt qu’en anglais renforce le statut culturel du français au Québec. Voilà le nœud de l’affaire. Or, le cégep est l’un des derniers lieux d’ampleur où peut encore se produire ce petit exploit quotidiennement arraché aux forces contraires de l’histoire.

 

      C’est précisément ce type de réalités qui semble échapper aux grands décideurs de notre système éducatif. En 2014, on a présenté les fruits d’un vaste « chantier » ayant comme objet de repenser le système collégial : ce qu’il est convenu d'appeler le « rapport Demers ».[17] Il faut le lire en regard du rapport Parent pour saisir toute l’étendue de la perte de sens qui s’est produite dans le réseau collégial. Le silence au sujet de la culture y est assourdissant. Les cégeps y sont clairement compris comme ancillaires du marché du travail : la formation générale ne doit surtout pas nuire à la mission fondamentalement économique du réseau collégial.[18] Pourtant, le rapport Parent, qui est à l’origine de la création des cégeps et qui en définit à la fois l’esprit et la mission, était très clair: le cégep y avait pour but de former à la fois le travailleur et la personne, dans une perspective humaniste. Son concept était très justement la création d’un lieu où la culture générale, dont il aura besoin comme être social, serait transmise à l’étudiant en même temps que les compétences professionnelles, dont il aura besoin comme travailleur ou universitaire. Le rapport Parent n’aborde pas directement, certes, la question du français. Mais c’est que le fait français au Québec semblait alors aller de soi. On ne s’imaginait pas que les institutions françaises viendraient à souffrir dans leur chair de la mise en compétition avec les institutions anglophones.

 

La Fédération des Cégeps, prenant prétexte de la lettre de la loi, ne tient pas la défense de la culture en français pour une mission fondamentale du réseau collégial : si le libre-choix met à mal les cégeps français de telle sorte que ceux-ci en sont réduits à angliciser leur « offre de service » afin de survivre, tant pis pour le français. Quant au rapport Demers, il tient la formation générale – la culture tout court – pour subordonnée à la finalité supérieure de la formation d’une main-d’œuvre adaptée aux besoins de l’industrie. Ce que j’appelle ici « la culture en français » ne semble pas avoir beaucoup d’amis en haut lieu.

 

 Mais peut-on vraiment imaginer une quelconque suite des choses pour le Québec français, sans le cégep comme on le connaît? Le cégep est l’antichambre de l’université et l’université – en principe –, le boudoir de l’esprit. Comment concevoir une vie intellectuelle proprement québécoise sans un réseau collégial francophone aux reins solides? À partir de quel lieu pourra se transmettre ici la culture en français si son foyer naturel se voit dénaturé?

 

            La situation est plus que préoccupante : elle est alarmante. La culture en français est en passe de devenir orpheline au Québec. Il n’est pourtant pas vrai de dire que cela relève de la fatalité historique. L’État québécois dispose de pouvoirs dont ne disposent pas d’autres petites nations enclavées comparables, comme par exemple la Catalogne, qui n’hésitent pourtant pas à défendre activement leur langue et leur culture.

 

            Servons-nous en.

 



[1] Les chiffres sont tirés de Frédéric Lacroix : « Les cégeps français à Montréal : le début de la fin? »,  L’Action Nationale, février 2020. Voir sur le même sujet Charles Castonguay : « Libre-choix au cégep : un suicide linguistique? », dans Les cahiers de L’aut’journal, Les Éditions du Renouveau Québécois, 2017. Le nombre de demandes d’admission à Dawson provient du cégep Dawson.

[2] Si le phénomène concerne principalement la métropole, la capitale n’est pas non plus épargnée. Le cégep St-Lawrence exerce un effet de drainage comparable, à plus petite échelle, à celui du cégep Dawson à Montréal. Voir à ce sujet : https://www.ledevoir.com/opinion/idees/500507/des-idees-en-revues-la-popularite-du-cegep-anglais-se-confirme-aussi-a-l-exterieur-de-montreal

[3] http://www.specs-csn.qc.ca/site-com/publications-divers/Conseil-superieur-education/amelioration-enseignement-anglais.pdf, pp 22-23.

[4] L’enseignement de l’anglais langue seconde, rapport du CREXE (Centre de Recherche et d’Expertise en Évaluation), ÉNAP, Ottawa, février 2015, p.7 et p.23. Ici : http://archives.enap.ca/bibliotheques/2015/03/030824704.pdf

[5] À ce sujet, voir Charles Castonguay : http://lautjournal.info/20180611/hausse-de-langlicisation-des-francophones-montreal

[6] « Le choix anglicisant : une analyse des comportements linguistiques des étudiants du collégial sur l’île de Montréal ». Disponible ici : http://languedutravail.org/sites/default/files/analyse_irfa_SEPTEMBRE2010A_5.pdf

[7] L’étude de l’IRFA (précitée) montre que 90% des étudiants qui choisissent le cégep anglais se destinent à l’université anglaise, et la majorité d’entre eux à travailler en anglais.

[8] Recensements de Statistique Canada, 2001-2016.

[9] Le taux global de réussite était de 82% en 2015-2016; notons que cela ne tient pas compte du fait qu’un même étudiant a pu se présenter à plus d’une « session de passation » de l’épreuve au cours de l’année scolaire. (http://www.education.gouv.qc.ca/fileadmin/administration/librairies/documents/Ministere/acces_info/Statistiques/Epreuve_uniforme_francais/Resultats_Epreuve_francais_2015-2016.pdf) Sur la facilité excessive de l’épreuve, voir par exemple : https://www.lapresse.ca/actualites/quebec-canada/education/200911/11/01-920817-examens-de-francais-au-cegep-pire-taux-dechec-en-10-ans.php.

[10] Voir, sur le « bilinguisme concurrentiel », Marc Chevrier et David Sanschagrin, « La politique des langues au Québec et au Canada », dans A. Gagnon (dir.), La politique québécoise et canadienne, Québec, Presses de l’Université du Québec, 2e édition, 2017, p. 423.

[11] https://www.mcc.gouv.qc.ca/fileadmin/documents/publications/politiqueculturelle1992_complet_ROC. pdf. P. 23

[12] Je ne caricature pas : voir le texte de son ex-président Gaëtan Boucher : https://www.lesoleil.com/opinions/point-de-vue/langue-denseignement-au-cegep-le-quebec-a-fait-le-bon-choix-5c0932e298536741e016ba6276f5172b

[13] https://fedecegeps.ca/wp-content/uploads/2013/04/M%c3%a9moire-F%c3%a9d%c3%a9ration-des-c%c3%a9geps-Projet-de-loi-14-F%c3%a9v.2013.pdf, particulièrement pp.12-13.

[14] Il est d’ailleurs regrettable que ce groupe d’intérêts qui réunit, sur une base volontaire, les hautes directions collégiales, passe pour le représentant officiel du réseau collégial dans l’espace public. Aucun mandat légal ne l’autorise pourtant à parler au nom, par exemple, des professeurs de cégep.

[15]  « Libre-choix au cégep : un suicide linguistique », Charles Castonguay, op.cit, pp.34-34.

[16] La démission tranquille, 6 mars 2020.

[17] Guy Demers, Rapport final du Chantier sur l’offre de la formation collégiale, ministère de l’Enseignement supérieur, de la Recherche et de la Science, Québec, juin 2014.

[18] Pour une critique en règle du rapport Demers : La liquidation programmée de la culture, collectif sous la direction de Sébastien Mussi, Liber, 2016.

Crédit photo: La fédération des cégeps (Wikicommons)


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